Memoire Du Livre
-
-
-
" dans moscou, schalom asch capte l'ensemble du monde dans ses facettes infinies.
Toute l'europe en guerre y transite, avec ses convois de trains transportant les juifs des zones frontalières, entassés dans des wagons comme du bétail, transportant les prisonniers blessés, assoiffés, qui inspirent des gestes de commisération, de sympathie, de solidarité aux paysans dont les fils meurent quelque part aux confins du continent. moscou rassemble tous les espaces antérieurs : pétersbourg, varsovie, vilno, lodz.
Moscou, apogée de la trilogie avant le déluge, réunit les protagonistes des volumes précédents et les place face à leur destin. dans moscou, le temps s'accélère, s'affole et se brouille-tout comme l'espace-en dimensions, combinaisons et variantes infinies. le présent va si vite qu'il est projeté aussitôt en passé ou en avenir, passé étalé comme repoussoir, avenir convoqué dans la rhétorique révolutionnaire.
Enfoui, menaçant, à l'affût, l'avenir est déjà là. moscou : ville monde, ville d'apparat, ville théâtre, scène de l'histoire oú se jouent la révolution et son devenir. schalom asch est passé comme un ouragan dans la littérature yiddish, portant en lui des univers non seulement divergents mais antagonistes. le mystère de schalom asch, car il y a bien un mystère schalom asch, c'est cette capacité de donner vie à chacun simultanément ".
-
1923-1924 : deux années folles en Allemagne, où une inflation démentielle ruine les salariés et enrichit les affairistes. Employé à la firme «Henry Kroll et fils, monuments funéraires», Louis vend des pierres tombales et des sculptures commémoratives. Le moment est favorable à ceux qui vivent de la mort des autres. Les aventures sont à portée de main et, quand la tristesse s'empare des hommes, la virée au bordel, où Fritzi la «jument de fer» propose des services très spéciaux, fait passer le vague-à-l'âme. Mais, peu à peu, Louis comprend ce que ces facilités de la vie lui avaient masqué : l'amour est ailleurs, et pourquoi pas auprès de son amie internée dans un hôpital psychiatrique ?
Ce récit de la transformation d'un homme dans une Allemagne gangrenée par la corruption et les débuts du nazisme se lit, comme tous les grands livres, à plusieurs niveaux. Pour le préfacier Lionel Richard, «la technique romanesque de Remarque consiste à dégager sur un arrière-plan réaliste, d'une écriture souvent à la hache et au vitriol, un plan qui contrecarre ce réalisme : il poétise les insatisfactions, les rêves, les aspirations de certains de ses personnages. Et il y parvient efficacement parce qu'il s'identifie à eux.»
-
Robespierre ne conduit pas un peuple, il veille simplement sur un dogme, écrit Friedrich Sieburg.
Si sa personne donne une impression de raideur et de taciturnité, ceci s'explique par cette sorte d'activité de sphinx où le dictateur s'épuisait durant de longues nuits. Son instrument est la Justice, son monde empirique le Club des Jacobins. Il n'a pas besoin d'organiser cette société, il n'a pas besoin de lui faire saisir les leviers de la vie publique. Tout cela s'effectue automatiquement, entraîné par le poids de l'Idée.
L'incroyable drame de la Révolution française, avec son horrible et grandiose explosion de passions, de personnalités et de tout ce que peut produire la nature humaine apparaît parfois comme un seul et même engrenage imposant à chacun son automatisme contre lequel tous essaient de réagir furieusement. Est-ce là la plus grande manifestation de l'individualisme ? C'est infiniment plus : c'est une course essoufflée sur la crête étroite qui sépare la politique de la mort.
Un " incorruptible " impose sa folie purificatrice et meurt de la violence qu'il a contribué à répandre. Pour Michel Voyelle, " à partir de sa confrontation ambiguë avec Robespierre associant admiration hypnotisée et condamnation radicale, Friedrich Sieburg transmet, à plusieurs niveaux de lecture, un témoignage précieux ". Ce livre, qui bénéficie d'une remarquable traduction de Pierre Klossowski, est la plus pénétrante étude consacrée à la Révolution française par un écrivain allemand du XXe siècle, comme le fut, sous forme dramatique, au XIXe siècle, La Mort de Danton de Büchner.
-
-
Un temps pour vivre, un temps pour mourir
Remarque-E.M
- Memoire Du Livre
- 17 Janvier 2001
- 9782913867116
-
" Anna Grigorievna Dostoïevskaïa ne s'insinue pas dans l'âme de son mari et " héros ", Dostoïevski, du moins dans sa part créatrice.
Elle s'appuie sur ce qu'il dit, ce qu'elle voit et vit, et encore sur ce que disent et écrivent les pairs et les connaissances du romancier. Elle s'en tient à l'homme, au vécu, retrace la vie et, à légères touches, réussit même à brosser la fresque de ce XIXe siècle russe finissant... On ne rendra jamais assez hommage à l'extraordinaire don d'observation d'Anna, à son art de relever les détails infimes, concrets (objets, petits faits quotidiens, scènes d'enfants, costumes, mobiliers, tableaux, etc).
Anna Grigorievna a la vivacité et le don du conteur. Elle habille de chair la trame du jour.
" Elle écrit juste et clair, avec une sobriété de moyens qui rassure, sans effets gratuits. Aucune coquetterie d'écriture comme il n'y avait aucune recherche de toilette dans sa vie austère et frugale. Pour autant, aucune tristesse et même parfois de l'humour gai et vivifiant, sans cette ironie agressive dont use Dostoïevski dans certaines de ses oeuvres.
Anna Grigorievna est une âme fraîche, directe et bonne. Elle emporte l'adhésion du lecteur par son absence de pose, sa sincérité et sa spontanéité. Et ses Mémoires élèvent le tombeau le plus vivant qu'on puisse composer en l'honneur de son grand homme, l'écrivain Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski. " Jacques Catteau.
-
" le protagoniste de pétersbourg est un tout jeune homme, zakhari mirkin.
Ce héros est seul : " tout le monde avait l'air de se rendre à une grande fête à laquelle zakhari n'était pas convié. ". il sera seul jusqu'à la fin oú, rencontrant les autres, il se rencontre lui-même. ce jeune homme évanescent, hors-jeu, irresponsable, s'incarne peu à peu : il rejoint, fût-ce en payant le prix fort, surmontant son orgueil de classe, le monde réel, celui oú l'on n'ignore pas ce qu'est la faim.
Un jour, enfin, viendra oú le gagnera un vrai sentiment d'appartenance. schalom asch, alors, quittera pour un temps les évocations individuelles pour peindre, en termes épiques, les " masses ", comme le ferait un grand peintre expressionniste. les manifestations ouvrières du 1er mai à varsovie, sous les bannières des drapeaux rouges, constituent probablement l'acmé de cette écriture qui sait soudain se faire violente, rejoignant les pages les plus saisissantes d'un zola.
Mirkin est, comme dirait georg lukacs, un personnage " problématique ", contradictoire. d'oú, pour nous lecteurs, son intérêt romanesque et notre possible identification : mirkin est pris entre le romantisme d'une action aux motivations à lui-même obscures et son souci sincère de rejoindre les autres dans une lutte commune. " henri raczymow.
-
Cosmopolite
Nabokov-N
- Memoire Du Livre
- Essais Documents Memoire Du Livre
- 18 Septembre 2002
- 9782913867352
En traîneau, la steppe infinie. Mais, très vite, s'installe la tragédie : Nabokov, enfant, croise Raspoutine - qui deviendra, plus tard, le héros de son premier opéra -, les données politiques changent et chassent la famille vers l'étranger.
C'est, alors, une vie de création et de rencontres. Les amis, à Berlin, à Paris, à New York, s'appellent Rilke, Cocteau, Picasso, Derain, Cartier-Bresson... Les artistes avec lesquels il travaille ont pour nom Stravinski, Diaghilev, Prokofiev, Balanchine... Ensuite, son goût de la découverte et du partage s'élargira au continent américain. George Gershwin et Elliott Carter, notamment, entreront dans son univers.
Rarement un homme aura su se passionner avec, une telle fougue pour son époque et sa planète, tracer autant de portraits au graphisme si juste qu'ils sont à la fois vrais et légendaires. Mais, quand il aura salué la plupart des artistes et des musiciens qui, avec lui, partout dans le monde, ont réinventé l'art et la musique, s'affirmera le besoin de retourner au pays natal. Et il revient, pour une visite empreinte d'émotion, à Leningrad et à Moscou. Ce " cosmopolite " fanatique n'avait jamais cessé de transporter la Russie avec lui.
-
Thomas Gordéiev règne sur la Volga, comme son père le faisait et comme on lui a appris à le faire.
Riche marchand, roi du commerce fluvial, il développe l'entreprise familiale et n'a pour rivaux que les autres patrons de bateaux, cupides et sans pitié. Mais Thomas n'aime pas réellement cette vie et ces servitudes inhumaines. Un jour, il abandonne tout et passe de l'autre côté, parmi ceux qui n'ont rien. Il est pauvre, raillé, méprisé. Gordéiev apparaît comme l'un des plus grands personnages de la littérature russe moderne.
Fort et émouvant comme l'Anna Karénine de Tolstoï ou le Raskolnikov de Dostoïevski. Il est à la fois vrai et mythologique. Ainsi que l'écrit François Eychart dans sa préface, " Thomas Gordéiev est un exemple de la maîtrise de Gorki à allier le coeur à la raison... Il n'est pas fortuit que ce roman soit consacré au monde des marchands qui sont, pour les Russes de la fin du XIXe siècle, ce qu'étaient les bourgeois pour les lecteurs de Balzac : l'exemple de la réussite par l'énergie, le manque de scrupules, la violence.
Au regard de l'évolution de la Russie d'aujourd'hui, Thomas Gordéiev demeure un roman d'actualité. Simplement, aucun Thomas, écoeuré des jeux d'argent, n'est venu dire leur fait aux nouveaux riches. Sans doute faudra-t-il attendre quelque temps l'apparition de ces fous qui aiment se mettre en travers de l'ordre des choses. C'est un trait qui ne témoigne pas d'une déraison mais d'un souci profond de l'unité de l'homme russe que Gorki a voulu faire vivre comme nul autre.
" Alexandre Blok l'avait senti lorsqu'il écrivait : " S'il existe ce je ne sais quoi d'immense, de vaste, de nostalgique, cette terre promise de l'âme que nous avons accoutumé de désigner du nom de Russie, alors c'est Gorki qui a su le mieux l'exprimer ".
-
-
" A la fin de l'année 1751, quand Amélia parut, Henry Fielding n'avait pas encore quarante-cinq ans.
Pourtant, il était déjà sérieusement malade. Il allait mourir trois ans plus tard.
Entre ses trois grands romans, Les Aventures de Joseph Andrews, Tom Jones et Amélia, à la fin de sa vie, Fielding exprimait sa prédilection pour ce dernier. "De toute ma progéniture, disait-il, Amélia est mon petit enfant préféré..." Et, peu de temps après la première édition anglaise, on pouvait lire dans la correspondance littéraire de Grimm et Diderot ce jugement qui n'est pas un mince éloge : "M.
Fielding est un auteur très original, grand peintre, toujours vrai et quelquefois aussi sublime que Molière." Amélia est un roman d'un réalisme révolutionnaire pour l'époque, un véritable roman politique qui met à nu les tares d'une société, nous conduit dans ses bas-fonds, parmi ses escrocs, ses consciences à vendre et à acheter, ses prostituées et ses honnêtes intermédiaires en tout genre, avec une hardiesse qui annonce Dickens comme Balzac, ou Les Misérables.
Amélia, c'est la gageure du roman d'amour après le mariage des protagonistes, la tentative d'embrasser les événements échelonnés sur une dizaine d'années, de faire vivre tout le centre de Londres avec les mascarades, les oratorios de M.
Haendel, les plaisirs du Vauxhall ou du Ranelagh. C'est la vue nouvelle sur le monde qui est celle, par exemple, du Neveu de Rameau, avec le maniement de l'appareil judiciaire de l'époque, celui de l'administration, la vie dans les prisons, dans les geôles des baillis comme à l'armée, toute l'échelle des pourboires indispensables, la corruption générale, bref, le rôle souverain de l'argent dans l'Angleterre d'après la révolution de 1688.
Amélia a des côtés âpres, douloureux.
La satire s'y fait cruelle et impitoyable. Mais en même temps, c'est une belle histoire d'amour, grave, tendre, bref : sentimentale. " PIERRE DAIX et ANNE VILLELAUR
-
Agé de 16 ans, Etzel Andergast, le fils du procureur Andergast, prend conscience qu'il y a une " affaire Maurizius ", classée et étouffée : un homme portant le nom d'Otto Leonard Maurizius est emprisonné pour meurtre depuis dix-huit ans.
Le jugement a été prononcé sur réquisitoire du procureur Andergast. Or, pour le jeune homme, la culpabilité de Maurizius est loin d'être établie. Tournant le dos à sa famille et à ses valeurs traditionalistes, Etzel traque l'homme qui pourrait connaître la vérité et se cache sous une fausse identité à Berlin. " Ce roman est fondé sur une célèbre erreur judiciaire qui, comme notre affaire Sacco et Vanzetti, a eu des répercussions dans le monde entier.
Avec la pénétration ample et profonde qui le caractérise, Wassermann élève ce thème à un niveau qui lui donne la grandeur d'une tragédie grecque... J'ai réfléchi sur " L'Affaire Maurizius " plus, je crois, que sur aucun autre livre que j'ai lu... Il me hante comme le Sphinx hantait les hommes d'autrefois ". Henry Miller.
-
-
Le dictionnaire khazar ; roman-lexique
Pavic-M
- Memoire Du Livre
- Romans Memoire Du Livre
- 29 Mai 2002
- 9782913867369
S'il raconte une histoire vieille de plus de mille ans, Le Dictionnaire Khazar est le premier roman du XXIe siècle.
S'il respecte l'ordre alphabétique, Le Dictionnaire Khazar peut aussi se lire à l'envers, en diagonale, au hasard ou en partant du milieu dans n'importe quelle direction. S'il relate la conversion des Khazars au IXe siècle (au judaïsme, au christianisme, à l'islam), Le Dictionnaire Khazar ne s'en tient pas là : la polémique rebondit au XVIIe siècle et resurgit en 1982. S'il se présente comme un lexique, Le Dictionnaire Khazar est un livre d'aventures, un roman policier, un recueil de nouvelles, un ouvrage cabalistique, un récit fantastique.
S'il s'adresse indifféremment aux bibliomanes, aux amateurs d'histoires de vampires, aux psychanalystes, aux joueurs, aux philosophes, aux historiens, aux collectionneurs de sulfures, aux philologues, aux rêveurs, Le Dictionnaire Khazar ravira surtout le lecteur heureux qui pourra le dévorer en utilisant l'oeil droit comme fourchette, l'oeil gauche comme couteau et en jetant les os par-dessus son épaule.
Depuis sa parution en 1984, Le Dictionnaire Khazar a été traduit en 28 langues et a fait l'objet d'une publication en CD Rom (qui englobe les versions anglaise, serbe, turque, grecque ainsi qu'une version en hebreu). L'édition que nous présentons aujourd'hui est l'édition " androgyne ", comme l'explique Milorad Pavic dans sa nouvelle introduction.
-
Joseph Kerkhoven
Jakob Wassermann
- Memoire Du Livre
- Romans Memoire Du Livre
- 30 Octobre 2002
- 9782913867437
Un immense romancier à réhabiliter et à placer parmi les plus grands, entre Dostoïevski et Thomas Mann. Un livre qui aborde les thèmes contemporains : le pouvoir de la science dans la société moderne, la place nouvelle des femmes... Pour les amateurs de la littérature allemande, et le public de Jacob Wassermann sensibilisé par la réedition de L'Affaire Maurizius et d'Etzel Andergast..